Le chien du Brigadier

De Bernard Clavel

 présenté par Michel Nougier

 

Dans ce roman Bernard Clavel aborde des thèmes qu’il affectionne particulièrement. C’est tout autant l’absurdité de la guerre et le scandale des vies gâchées, que la rédemption par la fraternité et le courage.

Nous sommes en 1938 Roger Germain, brigadier de gendarmerie, adore les animaux. Avec son chien Sophocle, un rottweiler au flair redoutable, il s’est établi une relation quasiment fusionnelle. Entre l’homme et la bête, il règne, en effet, une indéfectible fidélité que tout le monde admire. D’ailleurs Sophocle est devenu un auxiliaire de police très efficace. Plusieurs fois, il a sauvé des vies humaines, retrouvé des malfrats. Ses performances opérationnelles sont  si exceptionnelles qu’un jour, il sera publiquement promu « Brigadier-chef » par le capitaine en personne.

« Mais les hommes n’ont pas la même sagesse  que les chiens ou les chats », écrit Clavel. En effet, poursuit-il, « sévissait alors en Allemagne, un petit homme nerveux et gueulard qui avait une mèche de cheveux et une démarche assez comique ».

C’est ainsi qu’un jour, alors que la guerre n’était pas encore déclarée, le brigadier germain fut appelé à quitter sa tranquille caserne de gendarmerie pour rejoindre un régiment où il dut revêtir un autre uniforme et coiffer un casque. Bien entendu, on lui ordonna de prendre avec lui son chien qui était désormais devenu célèbre chez les militaires. Au demeurant, ces derniers l’adoptèrent immédiatement et avec le sourire. En effet Sophocle n’aimait pas Hitler car Germain lui avait appris à montrer les crocs lorsqu’il entendait prononcer le nom du Führer.

Même si le moral des troupes était bon, il n’en restait pas moins que chacun était bien conscient du sous-équipement de l’infanterie française face aux puissantes divisions blindées allemandes. C’est à partir de cet alarmant constat qu’une idée d’une terrible cruauté vint germer dans l’esprit un jeune officier français. Si, à l’instar des Russes, on dressait des chiens pour qu’ils aillent se glisser, le dos chargé d’explosifs, sous les tanks en marche, on pouvait combler une bonne partie de notre handicap matériel.  La proposition fut acceptée et Germain fut requis d’entrainer Sophocle à passer sous des engins en déplacement. 

Pour vaincre les réticences de Germain, tous les arguments furent avancés. La guerre n’aurait peut-être jamais lieu. La hiérarchie n’accepterait peut-être pas la création d’une unité spéciale de chiens tueurs de chars. Et quand bien même cette unité serait-elle constituée, au dernier moment, il serait toujours possible de déclarer que Sophocle avait peur des tanks, etc.

Finalement, l’entraînement commença.  On vida les refuges et les fourrières de la région  et la création de l’unité spéciale fut autorisée avec un grand enthousiasme.

Mais plus le temps passait, plus la menaces de conflit enflaient et plus Germain de venait sombre en  envisageant la perspective d’envoyer son chien se faire déchiqueter. 

 « J’ai toujours aimé mon chien et depuis qu’il m’a sauvé la vie, c’est encore bien autre chose », se disait-il la gorge nouée.

 

Dés le début du mois de septembre 1939, alors que l’armée allemande envahit la Pologne, les explosifs destinés à équiper les chiens tueurs de tanks sont livrés. Si les hommes sont assez fous pour s’entre-tuer, le brigadier estime que ce n’est pas l’affaire des animaux car ils sont innocents. Risquer son honneur et même sa vie pour préserver son chien? Le brigadier pourrait bien en être capable.