La légende de nos pères

SORJ CHALANDON

 

 

Je me suis mise dans la peau de l'auteur :

Nous sommes le 17 novembre 1983, j'assiste à l'enterrement de mon père, j'ai 27 ans.

Né le 14 novembre 1907, il est décédé le jour de ses 76 ans.

Nous sommes 9 et 3 drapeaux : ma mère, mon frère de 10 ans mon ainé, l'oncle VEURNES, un cousin, une amie et 3 « gars » de la résistance. Ils étaient trois rescapés, les autres déjà partis.

Mon père Pierre FREMAUX dit « BRUMAIRE », car il est né en novembre, du « Réseau Vengeance ». Les 3 gars sont Tescelin BEUZABOC, Tristan & « Compagnon ».

Tescelin BEUZABOC est accompagné de sa fille Lupuline que j'ai déjà croisée à d'autres enterrements des compagnons de mon père.

Mon frère est aveugle suite à une maladie depuis janvier 1975. En avril 1975 mon père est tombé malade « Cancer du chagrin » et n'a plus jamais quitté le lit.

J'étais trop petit quand mon père parlait de la guerre à mon frère. J'aurais dû prendre le temps, maintenant une page de notre histoire est partie.

Je m'appelle Marcel FRÉMAUX, j'ai été instituteur, puis 6 ans journaliste pour la Voix du Nord. Aujourd'hui biographe familial. Ma clientèle, des personnes qui veulent laisser une trace, raconter leur vie ou un moment essentiel.

Novembre 2002, je reçois une demande par courrier de Lupuline BEUZABOC.

Le rendez-vous est pris pour 15 heures, quand elle arrive, j'ai su qui elle était à ses chaussures rouges.

J'ai reconnu Lupuline, chaque fois que je l'avais rencontré à des enterrements des gars du « Réseau Vengeance » elle accompagnait son père et elle avait toujours des chaussures rouges.

Elle voulait faire un cadeau à son père, âgé de 84 ans, un livre qui retrace sa vie.

Son père avait été cheminot, à vingt ans, il a pris des risques terribles, elle veut garder une trace pour la mémoire.

Le 15 juin 2003, Lupuline est revenue, son père accepte de me rencontrer. Le rendez-vous est pris lundi à 17 heures aux 3 Brasseurs. Cinq jours plus tard, nous convenons d'un rendez-vous au domicile de son père le mardi de 16 à 17 heures.

Le mardi 24 juin 2003 première séance.

Le vieil homme va raconter son histoire. Ce qu'il raconte est la vraie histoire ou ce qu'il veut que ce soit. Est-il un imposteur ou pas ?

 

Ce livre nous donne à réfléchir sur le temps qui passe. De ne pas remettre à plus tard si nous devons parler ou transmettre. Car souvent, demain il est trop tard. C'est rare qu'une deuxième chance nous soit donnée. A nous poser la question, quand nous racontons un pan de notre vie, est ce que cela s'est passé exactement tel quel ? Avons-nous omis ou arrangé la vérité.

 

                                                                                                    Sylvie Maïo